Tunisie : La Banque Mondiale prévoit une croissance limitée de 1,9% pour 2025

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mannana dbibi mai 5, 2025, 7:51 AM

La Banque Mondiale et le FMI prévoient une croissance modeste pour l'économie tunisienne en 2025

La Banque Mondiale prévoit une croissance modeste mais en légère amélioration pour l'économie tunisienne en 2025, selon son rapport "Macro Poverty Outlook" publié en avril. L'institution projette une croissance de 1,9% pour 2025, avant une stabilisation autour de 1,6-1,7% pour la période 2026-2027. Toutefois, elle souligne que ces projections "sont soumises à d'importants risques baissiers", notamment en raison des incertitudes commerciales croissantes, des conditions de financement externe limitées et d'une possible détérioration des conditions de sécheresse.

Ces prévisions s'inscrivent dans un contexte économique mondial marqué par des incertitudes croissantes. Le Fonds Monétaire International (FMI), dans ses projections publiées le 22 avril lors des réunions de printemps, se montre légèrement moins optimiste en anticipant une croissance de 1,4% pour la Tunisie en 2025, un chiffre identique à la performance enregistrée en 2024 où l'économie tunisienne avait déjà affiché une croissance de 1,4%. Cette stagnation témoigne de la persistance des défis économiques auxquels le pays fait face.

Une économie encore en convalescence post-COVID

Quatre ans après la pandémie de COVID-19, l'économie tunisienne peine toujours à retrouver son niveau d'avant-crise. Selon la Banque Mondiale, le PIB réel en 2024 demeurait inférieur de 1% à son niveau pré-pandémique, malgré un rebond modéré en 2021 (4,3%) et 2022 (2,7%). L'année 2023 a même été marquée par une stagnation complète (0% de croissance).

Cette reprise timide s'explique par plusieurs facteurs, dont une sécheresse persistante, des conditions de financement externe incertaines, une demande intérieure et extérieure limitées, ainsi que des contraintes réglementaires qui nécessitent des réformes économiques substantielles.

Amélioration de la situation externe mais pressions budgétaires persistantes

Un point positif relevé par la Banque Mondiale concerne l'amélioration continue de la situation externe de la Tunisie en 2024. La croissance des revenus du tourisme (+8,3%) et des transferts de fonds des Tunisiens résidant à l'étranger (+11,2%) a compensé l'augmentation de 7,5% du déficit commercial des marchandises. En conséquence, le déficit du compte courant a diminué, passant de 2,3% à 1,7% du PIB entre 2023 et 2024.

Cependant, les pressions sur les finances publiques demeurent élevées. Bien que le déficit budgétaire se soit modéré en 2024, il reste supérieur à son niveau d'avant la pandémie (6,3% du PIB en 2024, contre 2,9% en 2019). La dette publique a également connu une hausse significative, passant de 67,8% du PIB en 2019 à 81,2% en 2024, sans compter les garanties gouvernementales et les dettes des entreprises publiques.

Pour 2025, la Banque Mondiale prévoit une légère baisse du déficit budgétaire à 5,8% du PIB, grâce à une croissance modérée des subventions et de la masse salariale, ainsi qu'à une augmentation modeste des recettes fiscales.

Un financement externe difficile

L'accès de la Tunisie aux financements internationaux demeure limité. Les investissements directs étrangers (IDE), bien qu'en hausse de 4,4% en 2024, ne couvrent qu'environ un cinquième du déficit du compte courant et des remboursements de la dette extérieure publique combinés.

Face à cette situation, les autorités tunisiennes ont de plus en plus recours à des sources nationales pour couvrir leurs besoins de financement externe, notamment un prêt de 7 milliards de dinars (2,3 milliards de dollars) de la Banque Centrale en 2024 et 2025.

Une inflation en baisse mais toujours préoccupante

Sur le front de l'inflation, la situation s'améliore progressivement. Le taux d'inflation a continué de baisser depuis les pics de février 2023, passant de 10,4% à 5,7% en février 2025. Cette diminution semble être due à la baisse des prix mondiaux, à la réduction de la demande intérieure et à un taux directeur relativement élevé.

Toutefois, l'inflation reste légèrement supérieure à la moyenne d'avant la pandémie (5,3%), et l'inflation alimentaire est plus élevée (7,1%), ce qui représente un défi particulier pour les ménages à faible revenu.

Chômage et perspectives sociales

Avec une croissance économique modeste, le taux de chômage a légèrement augmenté pour atteindre 16% au troisième trimestre 2024, contre 15,8% un an auparavant. Le taux de participation à la main-d'œuvre continue de stagner à environ 1,2 point de pourcentage en dessous du taux d'avant la pandémie, ce qui suggère un nombre plus élevé de travailleurs découragés.

En termes de pauvreté, la Banque Mondiale prévoit que le taux de pauvreté selon le seuil de pauvreté des pays à revenu intermédiaire inférieur (3,65 dollars par personne et par jour en termes de PPA 2017) devrait rester stable à près de 2% jusqu'en 2027. La part des individus pauvres et vulnérables selon le seuil de pauvreté des pays à revenu intermédiaire supérieur (6,85 dollars par personne et par jour en termes de PPA 2017) devrait diminuer progressivement, passant de 15,6% en 2023 à 14,3% d'ici 2027.

Des réformes nécessaires pour stimuler la croissance

Les deux institutions financières internationales s'accordent sur la nécessité pour la Tunisie d'entreprendre des réformes structurelles ambitieuses afin de relancer durablement sa croissance économique.

La Banque Mondiale souligne que "les perspectives de croissance de la Tunisie dépendent des efforts de modernisation économique visant à résoudre les distorsions économiques et les pressions budgétaires". Parmi les actions prioritaires recommandées figurent la mise en place d'un système fiscal plus équitable et efficace, l'amélioration de l'administration publique et des entreprises publiques, ainsi que la réduction des barrières à l'entrée de nouvelles entreprises.

"Les perspectives à moyen terme s'amélioreraient considérablement si la Tunisie prenait des mesures pour renforcer les politiques budgétaires, moderniser les entreprises publiques et favoriser une plus grande concurrence", conclut la Banque Mondiale dans son rapport.

Face à ces défis, la capacité du gouvernement tunisien à mettre en œuvre ces réformes structurelles sera déterminante pour l'avenir économique du pays et sa résilience face aux chocs externes dans un contexte mondial incertain.

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